Jacques Barrot et les clandestins de Calais : « Il faut que l’Europe s’engage »

La Voix du Nord – mardi 31.03.2009

Jacques Barrot et les clandestins de Calais : « Il faut que l’Europe s’engage »

 

Jacques Barrot, commissaire européen chargé de la Justice, des Libertés et de la Sécurité, n’a pas de « recette miracle » face au problème des réfugiés qui affluent tous les jours à Calais. Mais il plaide pour une action à l’échelle de l’Union européenne.

– Pour vous, le traitement du problème ne doit plus seulement concerner la France et la Grande-Bretagne ?
« La coopération franco-anglaise demeure nécessaire. J’ai rencontré récemment la ministre britannique de l’Intérieur, Mme Smith, et j’ai plaidé pour qu’il y ait une action auprès des migrants en situation irrégulière à Calais afin de les informer sur les procédures d’asile et leur réforme. La règle de Dublin voulait que seul le pays d’accueil qui reçoit la demande d’asile instruise cette demande. Aujourd’hui on peut admettre un transfert du dossier de la France à la Grande-Bretagne si le demandeur a fait état de la présence de sa famille de l’autre côté de la Manche. Pour ces migrants qui viennent pour la plupart de la Corne de l’Afrique, Érythrée et Somalie, il y a un besoin de protection internationale légitime puisqu’ils ne peuvent pas rentrer dans leurs pays. »

– Avez-vous senti chez les Britanniques la volonté d’ouvrir plus la porte aux demandeurs d’asile ? « Les Britanniques comprennent qu’ils doivent partager le fardeau mais il faut aussi que l’Europe s’engage. Au prochain conseil des ministres européens, je lancerai l’idée d’un plan de réinstallation en Europe des réfugiés. Les États membres doivent prendre une part de l’effort sinon on n’en sortira pas. Malte succombe aujourd’hui sous le nombre des demandeurs d’asile. Et le problème empire après un bref répit. On ne l’observe pas seulement à Calais. Ce que j’ai vu à Lampedusa et à Malte est effrayant. »

– Concrètement, qu’allez-vous faire en direction des réfugiés clandestins bloqués sur notre littoral ?
« J’ai fait adopter par la Commission la création d’un bureau d’appui. Il s’agit d’une agence européenne qui disposera à terme d’une centaine de personnes très spécialisées qui pourront aller sur les sites très difficiles comme Malte ou Calais et apporter leur expérience dans le traitement des demandes d’asile. »

– Quand cette structure d’appui sera-t-elle en place à Calais ?
« Il faut que le Conseil des ministres et le Parlement l’adoptent. J’ai bon espoir que cet accord intervienne avant que le Parlement se sépare en juin. Le bureau d’appui serait ainsi en mesure de fonctionner dès 2010. »

– L’urgence n’est-elle pas d’abord de donner un toit provisoire à ces migrants ?
« Si on commence à installer des structures d’accueil, on recommencera les errements de Sangatte. Ce qui est souhaitable, et je pense que le gouvernement français en est d’accord, c’est de faciliter le travail des associations qui viennent en aide aux migrants. Une fois le climat de confiance rétabli pour susciter de vraies demandes d’asile, je pense qu’il faudrait prévoir l’installation d’un centre d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) à Calais comme à Douvres. Les gens ont toujours peur que ces CADA créent un appel d’air. Mais c’est une erreur. Quand un tel centre est créé, les passeurs ne peuvent plus faire miroiter toute une série de solutions aux migrants en situation irrégulière.
Je ne suis pas sûr que l’on ait encore tout à fait saisi cela à Paris. » •

RECUEILLI PAR HERVÉ FAVRE

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